Formation : l’employeur doit veiller à l’obligation d’adaptation de ses salariés

L’employeur, qui n’a fait bénéficier son salarié d’aucune formation en 33 ans de service, manque à son obligation d’adaptation à l’emploi et doit verser des dommages et intérêts.

C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 8 juillet 2020. Un salarié engagé en qualité de gardien d’immeuble est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Contestant son licenciement devant la juridiction prud’homale, il demande également des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation par son employeur. 
Pour appuyer cette demande, le salarié souligne qu’il n’a pas bénéficié d’une quelconque formation en 33 ans de carrière.

Les juges du fond le déboutent de sa demande en retenant trois points :

  • il n’est pas établi que le salarié ne disposait pas des capacités nécessaires pour exercer ses fonctions d’employé d’immeuble ;
  • ses fonctions n’ont pas connu d’évolutions nécessitant une formation afin de lui permettre de continuer à les assurer de manière satisfaisante ;
  • le salarié n’a jamais demandé à bénéficier d’une formation ni sollicité son employeur de manière générale pour connaître les formations qui pouvaient lui être proposées.

Le salarié se pourvoit en cassation.Un manquement de l’employeur à son obligation d’adaptation

La Haute juridiction ne suit pas l’argumentation de la cour d’appel. Elle considère que l’employeur a manqué à son obligation d’adaptation dès lors que le salarié n’a bénéficié d’aucune formation durant sa longue présence (soit 33 ans) dans l’entreprise.

Les motifs invoqués par la cour d’appel sont inopérants pour la Cour de cassation.

En effet, l’employeur doit assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, notamment « au regard de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations » (article L.6321-1 du code du travail). L’employeur ne peut pas s’exonérer de cette obligation notamment en estimant que former le salarié n’est pas nécessaire en raison de sa situation. 
Le préjudice subi par le salarié ouvre droit à indemnité dont le montant est fixé par les juges du fond.

Cette solution confirme la jurisprudence rendue en la matière. Ainsi, dans une décision du 23 octobre 2007, la chambre sociale de la Cour de cassation a admis que le manquement de l’employeur à cette obligation peut entraîner un « préjudice distinct de celui résultant de la rupture du contrat de travail ouvrant droit à une réparation propre ». En l’espèce, la demande d’indemnisation
avait été faite par deux salariés qui ne s’étaient vu proposer qu’un stage de formation continue de trois jours en l’espace de 12 et 24 ans de présence dans l’entreprise (arrêt du 23 octobre 2007).

Dans une autre affaire, quatre garçons de cuisine d’origine malienne embauchés par un grand hôtel parisien ont obtenu des dommages et intérêts pour ne pas avoir bénéficié de la moindre formation professionnelle et évolution de carrière depuis leur embauche respective en 1977, 1980, 1985 et 1994 (arrêt du 2 mars 2010).