Covid-19 : le nouveau projet de loi sur l’urgence sanitaire prévoit une mise à l’isolement des personnes infectées

Le projet de loi prolongeant l’urgence sanitaire jusqu’au 24 juillet a été adopté samedi 2 mai en conseil des ministres. Le texte prévoit des mesures de mise en quarantaine et à l’isolement pour les personnes ayant été infectées par le covid-19, et il autorise le ministre à mettre en oeuvre un système d’information pour lutter contre l’épidémie.

Voté le 22 mars, « l’état d’urgence sanitaire » a permis au gouvernement de prendre plusieurs ordonnances touchant au droit du travail ainsi que des textes réglementaires restreignant la liberté de réunion et de circulation. Pour être prolongé au bout d’un mois, cet état d’urgence sanitaire suppose l’adoption d’un nouveau projet de loi. Le texte est désormais connu : adopté en conseil des ministres samedi 2 mai, il est examiné à partir d’aujourd’hui par les sénateurs (lire le document en pièce jointe). L’urgence sanitaire prorogée jusqu’au 24 juillet

Le projet proroge l’état d’urgence sanitaire, à compter du 24 mai 2020, pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 24 juillet. Le projet de loi comporte de nouvelles mesures visant à permettre, à partir du 11 mai, un déconfinement sous contrôle de la population, assignée à résidence depuis le 17 mars. Dès lors que l’ensemble de la population n’est plus soumise au confinement à partir du 11 mai, l’Etat souhaite désormais identifier le plus de malades et porteurs du covid-19 avec un dépistage massif (700 000 tests par semaine à partir du 11 mai, a promis le gouvernement) afin de les inciter à respecter, voire leur imposer le cas échéant, une mise à l’isolement pour éviter de nouvelles contaminations.

La mise en quarantaine et la mise à l’isolement peuvent être décidées soit lorsqu’une personne arrive sur le territoire national, soit « lorsqu’une personne affectée crée, en cas de refus réitéré des prescriptions médicales d’isolement prophylactique, un risque grave de contaminer d’autres personnes ».  Le Premier ministre a expliqué la semaine dernière qu’une personne aura le choix : soit rester à son domicile, ce qui entraînera aussi le confinement de son foyer, soit accepter de rester dans un hôtel réquisitionné. Mise en quarantaine et mise à l’isolement

La mise en quarantaine et le placement à l’isolement sont prononcés, sur proposition du directeur général de l’Agence régionale de santé, par le représentant de l’Etat, « par décision individuelle motivée ».  Le texte du projet subordonne le placement à l’isolement, qui ne peut, sauf accord de l’intéressé, dépasser une durée de 14 jours, « à la constatation médicale de la personne concernée ». Cette mesure peut faire l’objet à tout moment d’un recours devant le juge des libertés et de la détention.

Par ailleurs, le projet donne au ministre de la Santé la possibilité de mettre en oeuvre un système d’information « aux seules fins de lutter contre la propagation de covid-19 », un projet distinct, souligne le conseil d’Etat dans son avis, du projet Stop Covid pour lequel la Cnil a rendu un avis. Ce système vise à collecter des informations permettant de « déterminer les personnes ayant été en contact » avec des « personnes infectées ou susceptibles de l’être ». Il s’agit d’organiser les dépistages de ces personnes, les prescriptions médicales d’isolement prophylactique de ces personnes et leur suivi médical. Ce système peut comprendre des données de santé et d’identification qui seront accessibles à certains agents habilités (1). Le texte, qui suppose la prise d’un décret, autorise également le gouvernement à agir par ordonnance dans les trois mois sur ce sujet.

En attendant la mise au point et la mise en service de l’application Stop Covid pour laquelle de nombreux parlementaires réclament un débat, c’est bien l’enquête téléphonique effectuée département par département par des « brigades » (composées d’agents des caisses d’assurance maladie) qui permettra, avec le système d’informations prévu par ce projet de loi, d’identifier les personnes ayant été en contact avec des malades. De nouvelles possibilités pour l’Etat

Enfin, le texte modifie les changements apportés le 23 mars dernier au code de la santé publique (art. L. 3131-15). Il s’agit de permettre au Premier ministre, dans les territoires où l’urgence sanitaire est déclaré, de :

  • « réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules ainsi que l’usage des moyens de transport »;
  • « ordonner la fermeture provisoire ou réglementer l’ouverture d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public ainsi que de tout autre lieu de regroupement de personnes, en préservant l’accès aux biens et services de première nécessité »;
  • « ordonner la réquisition de toute personne et de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire ».

(1) Les agents « habilités des services du ministère de la santé, du service de santé des armées, de l’Agence nationale de santé publique, des organismes nationaux et locaux d’assurance maladie, des agences régionales de santé, des communautés professionnelles territoriales de santé, des établissements de santé, des maisons de santé, des centres de santé et des médecin prenant en charge les personnes concernées, ainsi que des laboratoires autorisés à réaliser les examens de biologie médicale de dépistage sur les personnes concernées ».

(src : Bernard Domergue pour Actuel CE)